L’usine PSA Peugeot-Citroën d’Aulnay-sous-Bois, le lieu de production de l’actuelle Citroën C3, représente depuis 1973 l’un des plus gros employeurs (avec 3.600 salarié-e-s) de la Seine-Saint-Denis, un département où 16.000 emplois industriels ont été détruits depuis 2008 (mais 50.000 ont été dans le même temps gagnés dans les services), et où le taux de chômage, le plus élevé d’Île-de-France, s’élève à 11.2 % (soit deux points de plus que la moyenne nationale). Surtout que le 93 est un département jeune (30 % de la population a moins de 20 ans) et que le chômage des jeunes augmente (en hausse de 26 % depuis 2008). Il aura donc suffi d’une note interne du 23 août 2009, interceptée par le syndicat majoritaire du voiturier (la CGT) et rendue publique le 09 juin dernier, qui faisait mention de la fermeture programmée de l’usine en 2014 (plus celle de l’usine Sevelnord d’Hordain dans le Nord dès 2013), pour mettre le feu aux poudres puisque 6.200 salarié-e-s se trouvent concerné-e-s. Il n’en fallait pas moins, malgré les avertissements de certain-e-s élu-e-s de gauche interpelé-e-s par la CGT, du maire PS d’Aulnay Gérard Ségura à la députée PC Marie-Georges Buffet, le premier affirmant d’ailleurs avoir reçu des garanties de la direction pour le maintien du site industriel jusqu’en 2016. Les mêmes et d’autres ont également bien rappelé que PSA avait bénéficié de généreuses aides publiques (notamment un prêt d’Etat de 3 milliards d’euros consenti en 2009 à Renault et PSA) pour protéger l’outil de production fragilisé par la crise économique de 2008. On connaît la logique prédatrice du capital : on fait suer le burnous en exploitant à mort le salariat de la boîte, on se goinfre de subventions publiques et autres exonérations de cotisations sociales, et puis dès qu’on a épuisé les ressources locales, on se casse avec la caisse !
Des indices de la restructuration économique…
Il existait des signes avant-coureurs de la catastrophe sociale qui se dessine avec la fermeture du site, et qu’avaient bien compris les salarié-e-s de PSA : en l’espace de dix ans, la production de la nouvelle C3 lancée en janvier 2010 a été divisée par trois, passant de 1800 voitures produites à 684 aujourd’hui réparties entre deux équipes ! Et si la direction explique dans les médias qu’elle souhaite produire plus de véhicules afin d’« améliorer le potentiel » en articulant ergonomie de certains postes et diminution du nombre de retouches, et si certain-e-s représentant-e-s des syndicats FO et CFE-CGC évoquent un coup de pub de la CGT, les délégués CGT comprennent au contraire que la situation est grave, déjà parce qu’il s’agit de produire une augmentation de la vitesse sur la chaîne couplée avec du chômage technique. Pour preuve : la semaine du 29 août jusqu’au 2 septembre sera chômée, au nom d’un « ajustement des volumes » dans le jargon technique de la direction. Déjà en 2008, la direction a fermé une partie des lignes de montage. En septembre 2010, c’est une équipe de nuit qui a fait les frais d’une stratégie qui ne dit toujours pas son nom, mais dont on connaît tant d’exemples précédents, de Renault Vilvoorde en 1997 à Continental Clairoix en 2009. La CGT affirme même connaître le calendrier de la boucherie : septembre 2012, annonce de la fermeture du site d’Aulnay ; janvier 2013, passage à une équipe au lieu de deux ; janvier 2014, fermeture du site. Avec un taux d'équipement de la population française de l'ordre de 80 %, l'enjeu économique pour les constructeurs victimes de la saturation du marché national consiste il est vrai à profiter de la concurrence mondiale en produisant et vendant des voitures aux pays émergents, principalement la Chine…
… aux réponses politiques divergentes !
Les grandes manœuvres visant à radicaliser et politiser un conflit pour le moment larvaire ont déjà commencé. Après les élu-e-s de gauche déjà cité-e-s (PS, PC, mais aussi l’adjoint du maire de Sevran Jean-François Baillon d’Europe-Ecologie-Les Verts), Nathalie Artaud, porte-parole de LO (fortement implantée dans la CGT de PSA), est intervenue pour marquer politiquement le territoire à l’extrême-gauche. A l’opposé du spectre politique, une tentative opportuniste du FN de distribuer le 27 juin des tracts en soutien aux salarié-e-s de PSA afin de cautionner son pseudo-virage social n’a pas vraiment fait mouche. Un comité formé notamment de syndicalistes SUD et CGT ainsi que de militant-e-s du NPA a su rappeler à l’ordre la dizaine de militants frontistes qui avaient fait le déplacement en se croyant conforter par les bons scores du syndicat jaune local (le SIA ou syndicat indépendant de l’automobile ayant pris le relais des anciens CSL et autres CFT, structure proche du patronat et de l’extrême-droite qui a réalisé des scores importants lors de récentes élections professionnelles) : le FN est le pire ennemi des travailleur-se-s. La position communiste libertaire consistera quant à elle à rappeler d’abord son soutien auprès des salarié-e-s des usines PSA (comme lors des luttes pour l’augmentation des salaires en février 2007, le mouvement sur les retraites à l'automne 2010 Nouvelles de PSA Aulnay ou encore récemment pour Ahmed Berrazzel : A PSA Aulnay, non au harcèlement syndical, non au licenciement d'Ahmed Berrazzel !), et à répéter ensuite que la politique antisociale du FN n’induira jamais aucune rupture avec le capitalisme malgré toutes les opérations de communication et les liftings « bleu marine ». Les communistes libertaires affirment enfin que la voie de l’émancipation induira l’expropriation des capitalistes qui se réalisera dans l’appropriation et l’autogestion populaires des moyens de production, cela dans une perspective radicalement démocratique, écologique et anti-productiviste.