Révélation du journal Libération du 21 septembre (http://www.liberation.fr/politiques/01012361119-collectivites-dexia-s-est-paye-leur-dette) ! La banque Dexia crédit local (DCL), qui est la banque historique des collectivités territoriales, a à partir de la fin des années 1990 incité, en raison de la concurrence accrue avec les Caisses d’épargne et le Crédit due à la libéralisation des échanges financiers, les élus locaux à se dispenser des habituels prêts à taux fixe pour tenter l’aventure des prêts à taux variable (bas lors de la signature, le taux peut méchamment augmenter lors de mouvements boursiers haussiers).
Un fichier confidentiel de Dexia révèle donc que 5.500 collectivités locales (à gauche comme à droite, modestes communes comme communautés urbaines) et établissements publics ont souscrit entre 1995 et 2009 des prêts toxiques dont les taux d’intérêt, indexés sur le cours de devises étrangères (franc suisse, dollar, yen) rapporté à celui de l’euro, aujourd’hui explosent. Notamment à cause de la hausse du franc suisse, de nombreuses communes ont vu leur taux d’intérêt passer à 10 %, et même davantage. Le surcoût de ces emprunts était évalué à 3,9 milliards d’euros à la fin 2009. Le document de Dexia révélé par Libé signifie que la faillite de certaines communes devient de plus en plus inévitable ! Le défaut de maturité ou de responsabilité politique a conduit un grand nombre de collectivités locales (villes, régions, départements, communautés de communes…) et d’établissements publics locaux (hôpitaux, syndicats d’économie mixte…) à accumuler des stocks d’emprunts toxiques. Avec pour conséquence des dizaines de services publics qui risquent d’être affectés, et probablement fermés.
En tant que président du conseil général de Seine-Saint-Denis, Claude Bartolone qui cherche à se faire mousser sur le dossier de la dette (cf. Du budget de révolte au budget de renoncement) afirme avoir découvert en 2008 que son département, lors du précédent mandat communiste, avait fait l’accumulation de prêts qui l’ont aujourd’hui intoxiqué. A la tête d’une association regroupant des collectivités très touchées, ce dernier a depuis décidé de porter plainte contre la banque Dexia. Est-ce seulement suffisant ? C'est d'un vaste mouvement d'expropriation des accapareurs de richesses dont on aurait besoin, vu que l’addition, en plus d’être salée, pourrait encore grimper jusqu’en 2030 ! Les emprunts toxiques n’ont pas fini de vampiriser les collectivités dont les administrés voient au-dessus d’eux planer désormais trois épées de Damoclès : l’augmentation des impôts locaux, un déficit de services publics, ainsi qu’une précarisation accrue des fonctionnaires statutaires remplacés par des non-titulaires corvéables et moins chers (cf. Pour une titularisation générale des précaires dans la fonction publique ! ; 15 questions sur le projet de résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique (territoriale)).
La crise de la dette est tout à la fois économique (la financiarisation du capitalisme) et politique (le discrédit des autorités publiques), internationale (la Grèce toujours, et toujours aussi l'Irlande et l'Ialie, l'Espagne et le Portugal) comme désormais locale (cf. Faire banquer les peuples : la dette, stade ultime de la bêtise capitaliste (I) ; Faire banquer les peuples : la dette, stade ultime de la bêtise capitaliste (II)).
Lorsque l’on considère la carte des emprunts structurés (dits « toxiques ») distribués par Dexia Crédit local (DCL), de 1995 à 2009 (et encore en exercice début 2010 : cf. http://labs.liberation.fr/maps/carte-emprunts-toxiques/), et qu’on jette un coup d’œil plus précisément à la situation de la Seine-Saint-Denis ou de certaines communes des départements avoisinants, on verra que peu de communes (exception faite de Saint-Denis ou du Blanc-Mesnil par exemple) échappent au couperet de la charge de la dette.
_ 0 à 10 % de surcoût : Epinay-sur-Seine, Villetaneuse, Garges-lès-Gonesse (95), Le Bourget, La Courneuve, Montreuil, Fontenay-sous-Bois (94), Villemomble
_ 10 à 20 % de surcoût : Saint-Ouen, Gennevilliers (92), Bobigny, Pantin, Le Pré-saint-Gervais, Rosny-sous-Bois, Noisy-le-Grand, Villepinte, Sevran
_ 20 à 50 % de surcoût : Drancy, Aubervilliers, Aulnay-sous-Bois, Noisy-le-Sec, Livry-Gargan, Romainville